Evolution et croissance du cannabis légal dans le monde
L’une des plantes les plus clivantes de l’histoire est sans conteste le cannabis. On peut assister à de nombreux débats au sujet de la réévaluation de son statut légal, qui font régulièrement surface. Ces derniers divisent les pro cannabis, mettant en exergue les vertus naturelles de la plante, et les anti cannabis, inquiets quant aux risques reconnus sur la santé suite à la consommation des principes actifs du cannabis, et notamment le plus décrié d’entre-eux : le THC. Malgré ces divergences d’opinions, on a assisté au cours de ces dernières années à un regain de popularité du cannabis, que ce soit par le biais de mesures prises par les Etats ou par de nouveaux modes de consommation développés de manière plus saine.
Un cannabis psychoactif mais dont la consommation est autorisée
Jusqu’ici, il existait un assentiment mondial selon lequel les pays prohibaient d’une voix la culture, le trafic et la possession de cannabis. Pour preuve, le premier traité international officiel dans lequel figure cette interdiction a été dressé par la Société des Nations en 1912 afin de contrôler et de lutter contre les drogues.
Versatile et relativement robuste, la plante a largement été utilisée dans le monde entier depuis le néolithique, se déclinant dans de nombreux cadres (textile, fabrication de papier, de cordages, alimentation…). C’est plus récemment à l’échelle de l’histoire qu’elle a connu une forte répression en raison de ses effets psychoactifs, dus au THC (tétrahydrocannabinol).
L’Uruguay, pays d’Amérique latine, a été le premier à ouvrir la marche en légalisant la consommation de cannabis psychoactif en 2013. Cette idée, qui semble aller à l’encontre de la logique générale quant au cannabis, a pourtant un but bien précis. En effet, la consommation de cette drogue est extrêmement difficile à enrayer. Face à ce constat, le pays a préféré la légaliser afin d’accroître le contrôle qu’il a sur celle-ci. Le produit est même vendu en pharmacie, en quantités limitées pour chaque consommateur.
Le contrôle financier peut aussi être un argument de poids à avancer dans cette prise de décision. A titre d’exemple, en 2016, le cannabis légal représentait 14 milliards de dollars, tandis que les bénéfices générés par le cannabis illégal ont pesé pour environ 140 milliards de dollars.
Enfin, les Etats peuvent se préoccuper de l’aspect sanitaire et de la qualité des produits de contrebande qui circulent, souvent coupés avec des substances encore plus nocives que le THC lui-même.
A ce jour, les deux seuls pays dans le monde à avoir pleinement légalisé le cannabis avec THC pour l’usage récréatif sont l’Uruguay et le Canada, depuis 2018.
D’autre part, sa consommation est partiellement légale dans ces autres parties du monde :
- Afrique du sud (2018)
- Inde (distinctions par Etats mais interdiction générale quant aux fleurs et à la résine de cannabis)
- Népal (une fois dans l’année, pour célébrer la fête de Maha Shivaratri)
- Etats Unis (autorisé dans 8 états du pays)
L’alternative du cannabis sans THC séduit de plus en plus
Le cannabis est une plante modulable. Selon la variété et les conditions de culture, les taux de cannabinoïdes présents varient fortement. De cette manière, il est possible de trouver des plants de cannabis contenant moins de 0.2% de THC, seuil légal en France et dans d’autres pays d’Europe (celui-ci s’élève à 1% en Suisse et 0,3% aux Etats-Unis). Ces mesures concernent donc le chanvre industriel, qui a la particularité de ne pas être psychoactif.
Ce type de cannabis, pauvre en THC, a vu sa production drastiquement augmenter. Alors qu’on en produisait 1.4 tonnes en 2000, une production totale de 211.3 tonnes a été comptabilisée en 2016. Au rang européen, la France se positionne à la première place du podium.
On compte aujourd’hui 25 pays en autorisant la culture, parmi lesquels figurent, entre autres, l’Italie, l’Allemagne, la Pologne, l’Ukraine, les Pays Bas, le Canada, la Chine, la Corée…
Le chanvre industriel présente de nombreux avantages, il est utilisé dans divers secteurs :
- le textile : confection de tissus, en association avec du coton
- les cosmétiques et le bien-être (produits au CBD, tirés de variétés dont la teneur en cannabidiol a été optimisée)
- usages pharmaceutiques (ex. Sativex, médicament utilisé pour soulager les douleurs liées aux pathologies graves comme la sclérose en plaques, les cancers etc)
- l’alimentation animale et humaine (farines sans gluten)
- la construction, grâce à son pouvoir d’isolant phonique et thermique. Il vient concurrencer la laine de verre, tout en étant plus intéressant car 100% naturel et inoffensif pour la santé
- matériaux dans l’industrie automobile notamment (plastiques moins denses)
Les évolutions à venir
En 2020 l’Assemblée Nationale française a voté en faveur du projet visant à expérimenter le potentiel du cannabis dans un cadre thérapeutique pour soulager les patients les plus durement touchés et améliorer leur qualité de vie. Cette nouvelle retentit particulièrement car elle pourrait permettre d’approfondir les connaissances que nous avons sur le potentiel du cannabidiol, qui reste encore largement à explorer.
Ailleurs dans le monde, des investisseurs n’hésitent pas à injecter des capitaux dans le cannabis légal, sentant que le marché a de beaux jours devant lui. Aux Etats-Unis, qui a dans certains états légalisé la plante, il a été estimé que d’ici 2021, ce marché représentera près de 70 milliards de dollars en valeur, dont un quart serait affecté uniquement à la vente pour la consommation, soit une croissance astronomique de 241 % comparé à 2018.
Pour ces raisons, certains sont amenés à penser que de plus en plus de pays pourraient, à terme et selon différents objectifs, assouplir les lois concernant la circulation et la consommation de cannabis à l’avenir, bien que rien ne soit prédictible à 100%.
Sources
La légalisation du cannabis dans le monde – Le Monde – 07/02/2021
La légalisation du cannabis gagne du terrain aux Etats-Unis – Les Echos – 10/05/2021
Du chanvre industriel au cannabis: une même plante et des usages… variés – GEO – 11/10/2019